IV - Les effets sur l'économie réelle.
Ils ne sont pas homogènes d'un pays à l'autre.
Le taux de croissance mondiale, qui a atteint 4 à 5% pendant les années 2000-2005 est l'un des plus forts connus dans l'histoire du monde. Il ne reflète pas les disparités observées entre les régions du monde, car :
l'Asie connaît des taux de croissance de 8 à 10%
les Etats-Unis se situent autour de 4 à 5%
l'Europe peine autour de 2 à 3%
l'Afrique atteint 4 à 5%, mais part de si loin
l'Amérique latine dépasse les 5%
Les écarts entre pays sont aussi importants, par exemple au sein de l'Union Européenne. Ces écarts suffisent pour comprendre que la crise financière n'explique pas à elle seule la dynamique ou, au contraire, la stagnation de l'activité économique.
L'on doit s'attendre à une égale disparité dans l'effet des conséquences de la crise des marchés financiers sur ce que l'on appelle l'économie réelle.
Celle-ci est l'économie fondée sur la production, le commerce et la consommation de biens et services.
41 - L'économie mondiale
Situons en volume, le poids de la crise financière évaluée à ce jour, par rapport à l'économie réelle mesurée par le PIB (Produit Intérieur Brut). Les 2000 ou 3000 milliards de dollars évaporés par les marchés financiers sont à rapprocher du tableau suivant :
Pays |
Produit Intérieur Brut en Mrds USD $ - Année 2006 |
Population estimée |
Total Monde |
48292 Mrds |
6 Mrds |
OCDE* |
40449 Mrds |
1,2 Mrds |
Etats-Unis |
13150 Mrds |
0,3 Mrds |
Union Européenne* |
12961 Mrds |
0,45 Mrds |
Japon |
4521 Mrds |
0,12 Mrds |
France* |
2589 Mrds |
0,06 Mrds |
Chine |
2641 Mrds |
1,40 Mrds |
Bresil |
1041 Mrds |
0,18 Mrds |
Russie |
956 Mrds |
0,15 Mrds |
Inde |
887 Mrds |
1,10 Mrds |
G20 |
40000 Mrds |
4 Mrds |
* Année 2007 - Source : ONU
Les pays membres du G20 représentent 80% de l'économie mondiale. Ces
données prennent en compte l'activité économique comptabilisée par les
états, selon les normes internationales. Il est difficile d'évaluer
l'importance de "
l'économie informelle", développée dans tous les pays,
notamment les plus pauvres, Elle recouvre des contenus divers, allant
de la production de produits de subsistance, aux trafics illicites et
criminelles, en passant par le travail non déclaré.
Les impacts de la crise sont difficiles à percevoir à ce stade. Certains secteurs
d'activité, certaines entreprises, et aussi des particuliers étaient
fragilisés avant l'affaire de la subprime, pour d'autres raisons que la
situation des marchés financiers, notamment dans les pays pauvres.
C'est aussi le cas de certaines industries comme l'automobile. La forte
hausse des prix des matières premières et de l'énergie au cours des
années passées, due pour une part, il est vrai, à la spéculation mais
aussi à leur raréfaction a mis en difficulté de nombreux secteurs
d'activité et écarté les plus pauvres du marché.
Mais il est clair que la raréfaction du crédit, conjuguée avec le doute des agents
économiques quant à l’avenir va ralentir l’investissement et la
consommation. Doute préexistant lié à l’évolution des prix des matières
premières, aux contraintes environnementales, à la conscience que nos
modes de vie changent et que l’avenir n’est pas sûr. Jouent également
les facteurs locaux propres à chaque région ou pays tels que la
démographie, le niveau de développement, la dimension culturelle, la
relation à l'avenir. Les pays comme les personnes les plus fragiles
risquent de souffrir davantage surtout si l’on reste dans l’idée que le
marché règle tout. Des protections sont nécessaires.
La
capacité de réaction de chacun est déterminante. La volonté politique
est indispensable dans tous les cas. Son efficacité dépend des armes
dont les gouvernements disposent : ressources budgétaires, marge
laissée par la pression fiscale, possession de ressources naturelles,
qualité de ses ressources humaines, structure de sa démographie
Conjuguée avec la conscience croissante de la globalisation, de la
nécessité d’épargner la planète, la crise financière peut jouer un rôle
de catalyseur pour nos sociétés. Ainsi, les crises précédentes, aussi
douloureuses qu'elles furent, ont été suivies de périodes de croissance
et de prospérité. Le destin de l'humanité ne s'est-il pas forgé sur
cette alternance de crises et de reprises ?
L'heure de la
décroissance, souhaitée par certains est-elle arrivée ?
Nous
sommes dans une phase dite de croissance faible ou nulle, parfois de
récession. Les mesures prises dans l'urgence nous épargneront-elles la
dépression grave et générale, mondiale ? Nous devons y croire.
42- Les effets possibles
Il est néanmoins possible d’entrevoir les domaines les plus concernés.
Les
revenus risquent d'être touchés par la crise. Déjà, on annonce une
recrudescence du chômage, et sans doute une stagnation des salaires et
une réduction des revenus, des profits, avec des disparités selon les
secteurs. Les revenus financiers, issus des placements et des
investissements financiers risquent d'être impactés par la chute des
valeurs boursières et immobilières.
La
consommation va privilégier le nécessaire par rapport aux superflus, avec des nuances
selon les niveaux de revenus. L’on voit mal, en effet, comment les plus
pauvres peuvent encore se restreindre. Ils souffriraient encore plus
d’un écroulement du système. Pour les populations les plus favorisées,
n'y a-t-il pas une opportunité pour réviser nos modes de vie et
découvrir les vertus de la modération ?
L'épargne : Les comportements épargnants des peuples sont très hétérogènes. En France,
au cours des 20 dernières années, le taux d'épargne nette des ménages a
varié de 10 à 13% de leurs revenus disponibles. Les taux américains et
anglais ont évolué respectivement de 7%à 1,2% et de 8%à 2,5%
L’
investissement va rechercher davantage la sécurité au détriment du seul profit, ce qui
n’est pas un inconvénient, sauf si la rentabilité devient insuffisante
pour investir ! L’on observe déjà des secteurs touchés, tels que
l’automobile, le bâtiment.Les pays disposant de capitaux importants
tels que les producteurs de matières premières, ou certains pays
émergents, ont les moyens de
recapitaliser les sociétés américaines ou
européennes en difficulté. La Chine, les Emirats, la Russie et d’autres
pays aux fonds souverains abondants feront « leur marché » parmi les
entreprises dont les "fondamentaux" sont solides et dont le
savoir-faire leur est utile. Nous sommes à la veille d’une
redistribution du pouvoir dans le jeu économique au niveau mondial. Les
équilibres au sein de l’économie globalisée vont évoluer au détriment
de l’hégémonie américaine et occidentale Le rééquilibrage des pouvoirs
au sein des institutions internationales (FMI, OMC,) est nécessaire,
sous réserve qu'il donne leur place légitime à tous les pays, même les
plus faibles et se libère de toute hégémonie.
L’investissement industriel peut se ralentir, mais les grandes entreprises disposent
d’une plus grande capacité d’anticipation et se positionnent vite sur
l’après crise. Elles ont un rôle essentiel à jouer dans la relance, en
appui de la politique des pouvoirs publics. La crise devrait aider à
faire redécouvrir les vertus et l'efficacité des petites et moyennes
entreprises.
L’investissement public, réalisé par l'Etat, les
Régions, les Départements, les Communes très important en France et en
Europe, est un moteur essentiel de la relance. Les états ont donc un
rôle majeur à jouer, en fonction de leur volonté politique et aussi de
leur situation budgétaire. Chaque pays pour définir sa politique devra
néanmoins prendre en compte le contexte qui est le sien car la
globalisation conditionne ses choix. La démonstration en a été faite
par l’Union européenne.
L’euro qui nous a efficacement protégés exige
que chaque pays se sente solidaire dans sa politique économique et
financière. La marge de manœuvre des collectivités publiques reste
conditionnée par leurs capacités fiscales et financières, selon
qu'elles sont en mesure ou non d'augmenter l'impôt, d'emprunter, ou
d'accroître leur déficit (qui consiste à faire supporter une partie de
la relance par les générations futures). L’investissement public est
l’un des premiers volets d’une politique sociale dans la mesure où il
crée de l’emploi et assure des revenus. Encore doit-il répondre à de
vrais besoins de la population et préparer l'avenir par exemple en
privilégiant l'investissement vers une économie respectueuse de
l'environnement et prenant en compte la raréfaction des ressources
nouvelles. Il s'agit de donner un autre contenu à la croissance. Si
celle-ci reprend rapidement, les recettes fiscales en seront vite
améliorées.